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La Grèce et la pandémie

Dernière mise à jour : 19 juil. 2020

Pandémie : en grec ancien : le peuple tout entier, issu de "pan" : tout » et "demos" : le peuple, tout le peuple. Par extension, une épidémie qui s’étend à tous.





C’est une bonne nouvelle pour le peuple grec qui inventa ce mot : le nombre de cas recensés et de victimes en Grèce est très en dessous de celui des autres pays européens.

Le pays s'est très bien défendu dans cette nouvelle crise, sanitaire cette fois.

L'arrivée des touristes depuis le 1er juillet a fait un peu remonter les chiffres de contamination mais le rivage grec offre des eaux turquoises alléchantes et le tourisme est l'un des piliers de l'économie nationale.

Les arrivées sont contrôlées et des mesures sont prises en fonction des évènements. Une grande réactivité qui permet de maintenir la sécurité sanitaire du pays.

En Mai 2020, le pays était en effet classé 62ème dans ce macabre palmarès mondial, bien placé dans un classement international, ce qui ne lui arrive pas souvent.

En comparant donc les chiffres des états européens aux populations analogues et à l’apparition conjointe du premier cas de contamination, la Grèce a toujours été très en dessous, le nombre de cas, très bas.

Pourquoi peut-on se demander ?

Notons certains facteurs, non scientifiques, qui sont des pistes de réflexion.

Ils tiennent à la structure de la société, ont aidé à freiner la propagation du virus et à accepter les règles du confinement décidé très tôt par le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis. Le pays peu enclin habituellement à suivre de bonne grâce les directions gouvernementales, fut bon élève.

Ce virus fragilise les personnes âgées et les anciens sont aimés et choyés dans la société grecque. Ils vivent avec les autres membres de la famille et ont un statut privilégié. Les enfants y sont très attachés pour la bonne raison qu’ils partagent avec les parents leur éducation. Il est donc très rare de confier une personne âgée à un institut comme les EPHAD. On préfère à cela faire appel à des aides à domicile si besoin est, qui s’installent à demeure, même dans des foyers à revenus moyens. Les enfants ayant grandi aussi bien avec leurs grands-parents que leurs parents, il est difficile pour un jeune homme d’imaginer transmettre ce virus à sa « giagia », grand-mère en grec, par imprudence ou sortie irraisonnée.

La maladie lorsqu’elle surgit et quelle que soit la pathologie est l’affaire de tous. Lorsque quelqu’un tombe malade, subit une opération, dans l’entourage familial toutes les forces sont mobilisées pour accompagner à l’hôpital, nuit et jour, le patient qui ne sera jamais seul. Faute de personnel hospitalier sûrement mais pas seulement.

Tout sera donc fait en amont pour que les personnes âgées ne se retrouvent pas seules à l’hôpital et pour contrer une possible contamination.

La solidarité familiale joue comme toujours dans ces crises à répétition que connaît le pays. Les domiciles de chacun, s’ils ne sont pas tout simplement les mêmes, sont très proches, souvent situés dans le même immeuble. Les personnes âgées ne sont pas isolées, il est donc facile de les approvisionner sans avoir besoin de sortir, de leur apporter à manger en ville comme au village.

Autre facteur important, l’hygiène. La propreté fait partie de la bataille à mener contre le virus. L’une des priorités de la ménagère grecque est de tenir sa maison impeccablement. C’est sa fierté et son devoir d’être une « Nikokira », la dame de la maison, c’est-à-dire une parfaite maîtresse de maison. C’est une seconde nature.

Les maisons sont en effet tenues de mains de maître, tout brille, pas un brin de poussière, un travail sans relâche appris de mère en fille. Les pièces sont rangées, propres, les tapis nettoyés chaque printemps, comme les murs, les rideaux, toutes les couvertures, la liste est longue et suit le cycle des saisons. Les fruits et légumes lavés bien avant la pandémie.

Alors on imagine facilement que lorsque l’on recommande aux grecques de tout laver, tout est réellement lavé, les surfaces passées à l’eau de javel et rincées à grande eau.

Le port du masque est également très répandu pour se rendre dans les magasins. Gants ou gels alcoolisés sont utilisés par la majorité.

Celui qui orchestre ce confinement décrété le 13 mars par le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis, alors que le premier cas d’infection est repéré le 25 février, c’est le Dr Sotirios Tsiodras.

Toute la Grèce l'a écouté chaque soir à la télévision à 18h. C‘est l’heure du point sur la pandémie au niveau national et international. Il s'est acquitté de cette tâche chaleureusement, donnant les derniers chiffres mais divulguant aussi des conseils, du bon sens.

Ce médecin calme, au ton rassurant, simple et sensible dans sa présentation, a conquis l’opinion publique.

Après avoir étudié au Beth Israel Deaconess Medical Center et à Harvard, il revient en Grèce et dirige le service d’épidémiologie de l’hôpital Attikon à Athènes.

Il a su convaincre, avec une équipe de scientifiques, le Premier Ministre et la population qu’un confinement précoce rapide et total serait déterminant dans la lutte contre le virus.

Le nombre réduit de lits en réanimation, résultat des coupes sombres intervenues pendant la crise et les mesures d’austérité imposées au pays, n’aurait laissé que peu de chances aux patients les plus atteints.

Autre atout. Il est « chantre » c’est-à-dire qu’il chante la liturgie selon le rite byzantin tous les dimanches à la messe et sa connaissance de la religion, sa dévotion et sa participation active à l’orthodoxie en fait un interlocuteur digne d’écoute. Le Saint Synode de l’Église Orthodoxe a peut-être été influencé dans sa décision de suspendre les cérémonies religieuses par ce médecin très croyant.

L’épidémie se serait vite propagée en embrassant les icônes à l’entrée de l’église comme le veut la tradition orthodoxe, et pendant la communion où le vin consacré est bu dans une petite cuillère. La même pour tous.

Autre phénomène, très grec, qui joue dans la bataille un rôle important : la diaspora, les bienfaiteurs grecs se sont mobilisés. Ainsi les armateurs établis à l’étranger offrent du matériel aux hôpitaux et tentent de soutenir un système de santé national malmené depuis des années.

Et les mécènes ont joué leur rôle de bienfaisance, comme la famille du célèbre armateur Stavros Niarkos qui a offert 100 000 000 de dollars au pays pour lutter contre la pandémie.

Point sombre, la gestion des migrants assaillant les côtes grecques et les frontières de l’Union européenne, sans aide de la part des amis européens. De ce côté-là se profile un danger, pour l’instant maîtrisé : si le virus devait prendre feu dans les camps de réfugiés, les conséquences pourraient être dramatiques.

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